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LE PARISIEN

Arpajon|14 décembre 2015

Il fait vivre la mémoire du Dr Babin, résistant d'Arpajon

fusillé le 15 décembre 1941 

Une enquête à rebondissements, mêlée de promesses et coïncidences, qui a conduit Alain Bouyssy à créer le Comité pour la Mémoire des Résistants au nazisme dans la région Arpajonnaise (Comra). L'association de 100 adhérents dépose ce mardi une gerbe devant l'ancien cabinet du Dr Babin, « médecin des pauvres » d'Arpajon, dans la rue qui porte le nom de ce résistant fusillé à 52 ans, par les nazis le 15 décembre 1941.Mais le Dr Babin, communiste arrêté pour propagande, n'y est pas enterré comme l'a découvert Alain Bouyssy. « A côté du miroir devant lequel se rasait mon grand-père, il y avait deux photos : Jean Moulin et le Dr Babin ! Ma mère, Ginette, vénérait ce médecin, qui l'avait mise au monde », se souvient-il, à propos du radiologue généraliste qui a donné son nom à un stade de La Norville et à une rue de Saint-Germain.Alors quand Ginette achète une maison au Croisic (Loire Atlantique) en 1986, elle supplie son fils de s'arrêter non loin, à Chateaubriand, pour se recueillir dans « la carrière des fusillés » où serait tombé Louis Babin, et, avant lui, 27 résistants dont Guy Moquet le 22 octobre 1941. « On ne trouve rien à la carrière, les habitants ne savent rien, pas de tombe du Dr Babin… Ma mère est tellement déçue que je lui promets de la trouver », raconte-il.Il découvre sa sépulture en 2001Son enquête rebondit en 2001. « Une amie, passionnée de cimetières, m'assure avoir découvert la tombe du Dr Babin au Croisic ! » s'emballe Alain Bouyssy, qui conduit sa mère là où repose le Dr Babin depuis… 1952. « Son père, ancien pharmacien d'Arpajon, avait acheté une usine à gaz au Croisic, où il est décédé en 1952 : c'est probablement à ce moment que le corps de son fils a été inhumé avec lui. Ses deux frères y sont aussi », relate Alain Bouyssy, qui retrace le parcours du résistant en compilant des archives militaires de Vincennes (Val-de-Marne), des états civils, des témoignages. Louis Babin est né en 1889, et étudie au lycée à Lakanal de Sceaux (Hauts-de-Seine). Il s'engage dans la 1re Guerre mondiale, devient aide-médecin sur les fronts de la Marne, de Verdun, de l'Artois. Blessé au talon, il portera des bottes à vie. Il est décoré 7 fois, reçoit la Légion d'honneur. Il rejoint Henri Barbusse et adhère au parti communiste en 1919, est élu au conseil municipal d'Arpajon en 1935. Il crée « les Libellules de l'Orge », club de planeurs, « l'Ecolier au grand air », centre aéré à Marcoussis pour les jeunes modestes, et la « Jeunesse ouvrière sportive arpajonnaise » (Josa) dotée d'une équipe de foot.Pendant la 2e guerre, il distribue des tracts communistes et organise des réunions. La gendarmerie d'Etampes le fait arrêter sur dénonciation, il est interné au sanatorium d'Aincourt (Val-d'Oise) puis au camp de Choisel à Châteaubriand où il sera fusillé en représailles d'attentats perpétrés contre des officiers allemands à Paris. « Je n'ai pas le droit de m'attendrir devant les soldats allemands qui me regardent encore et je vous embrasse simplement tous, comme on peut embrasser pour la dernière fois », écrit-il avant d'être attaché à un arbre au lieu-dit « La Blisière ». Il est abattu, avec huit compagnons communistes.Ils ont été sciemment répartis aux cimetières de Fay-de-Bretagne, Notre-Dame-des-Landes et Casson, anonymement pour éviter tout recueillement. Babin sera identifié à Fay où il a été inhumé avec ses médailles et ses bottes, dans lesquelles il est resté aussi droit que dans ses idéaux.

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