COMPTE RENDU DE LECTURE

10/2018

Anny Latour

 

La Résistance juive en France (1940 – 1944)

(Stock 1970, 301 pp.)

 

                Malgré son ancienneté (1970), cet ouvrage constitue une mine de renseignements variés et précis sur ce que fut la résistance des Juifs pendant l’Occupation en France (comme l’attestent l’abondance des sources et la bibliographie).

                Trop souvent encore de nos jours considérés comme passifs pendant la Seconde Guerre mondiale face au génocide dont ils étaient les victimes, voire naïfs et aveugles malgré les informations et les avertissements qui s’accumulaient, les Juifs ont cependant, pour les plus conscients, les plus courageux et les plus combattifs d’entre eux, réussi à s’organiser, à s’entraider, à prendre les armes pour contribuer, avec les autres réseaux de résistants, à la libération de notre pays du joug nazi.

                C’est le mérite essentiel de ce livre de détailler toutes les actions entreprises par leurs différents mouvements : réseaux souterrains de sauvetage d’enfants, la Sixième, la Jeunesse sioniste, l’Armée juive, le Groupe hollandais, le Service André…

                L’auteure Anny Latour est historienne mais elle fut aussi résistante. Au moment où elle rédige son œuvre, elle a pu recueillir, notamment en Israël, les témoignages d’acteurs encore vivants à l’époque. D’où des récits de première main émouvants et captivants.

                Les mouvements juifs sionistes et juifs communistes athées travaillèrent parfois en étroite liaison pour lutter ensemble, les armes à la main, contre l’ennemi commun. C’est donc avec une nostalgie certaine de cette période d’union fraternelle que le lecteur avance dans les relations qui se succèdent avec rigueur.

                Il faut lire cette œuvre comme un hommage rendu à tous ces Juifs combattants de l’ombre, mus ou non par la foi, qui ont refusé, très tôt pour certains, de se laisser conduire à l’abattoir comme des esclaves sans réagir. C’était là une leçon que les bourreaux nazis ne pouvaient comprendre : les Juifs étaient des êtres humains à part entière qui, avec dignité, courage et audace, ont réussi sans se résigner à résister à ceux qui se prétendaient de la race des seigneurs.

                Depuis la parution de ce livre, beaucoup d’autres historiens ont apporté de nouvelles informations et connaissances sur le même sujet, mais cet ouvrage reste une première approche utile, ne serait-ce parce qu’il bat en brèche des idées toujours reçues, hélas !

                Il est d’autant plus regrettable que, malgré les souhaits sincères de l’auteur et cinquante ans après les événements mémorables et optimistes rapportés, l’Etat d’Israël n’ait toujours pas mis en œuvre en Palestine les principes hautement humanistes qui fondaient la résistance juive en France de 1940 à 1944 aux côtés de tous les autres réfractaires, maquisards et partisans de la liberté.

 

                                                                                                                           Daniel Desponts